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Blanchiment d’argent: le mode opératoire des banques Camerounaises

(Ripostes,Georges Semey). D’après la Banque des États de l’Afrique centrale, les établissements de crédits locaux sont acteurs ou complices de pratiques douteuses. Quatre pratiques illégales ont été dévoilées par Yvon Sana Bangui, le Gouverneur de la Beac, dans une récente lettre-circulaire.

Les banques Camerounaises luttent-elles suffisamment contre le blanchiment d’argent ? Réponse négative, d’après la Banque des États de l’Afrique Centrale (Beac). L’institution monétaire sous-régionale pense que les établissements de crédits du Cameroun, favorisent dans leurs pratiques et fonctionnement, ce phénomène financier qui fait perdre au trésor public, des centaines de milliards de FCFA chaque année.

Cette certitude repose sur quatre éléments récemment dévoilés dans le contenu d’une lettre-circulaire d’Yvon Sana Bangui, le Gouverneur de la Beac, adressée aux banques Camerounaises. Premièrement, il est reproché à ces dernières, un laxisme dans l’ouverture de comptes au profit des clients non-résidents (personnes qui ont présenté des documents étrangers afin d’ouvrir leurs comptes bancaires au Cameroun en XAF-FCFA).

Concrètement, et sous réserve d’un complément d’informations, la Beac relève que les banques locales brillent par une complaisance dans l’ouverture des comptes aux non-résidents, en passant outre certaines conditions rigoureusement obligatoires, notamment, celles relatives aux informations sur ces clients, avant toute ouverture de compte, à travers un formulaire intitulé « Know your customer « , en abrégé KYC (plan de localisation, copie de la carte nationale d’identité, numéro de téléphone …)

Autre reproche, ce sont les transactions réalisées au profit des comptes des non-résidents, sans lien avec l’objet du compte. Formellement, il a été constaté que lors de l’ouverture d’un compte épargne dans une banque par un client, l’analyse des mouvements indique que lesdites transactions sont parfois effectuées à partir de l’étranger, et l’auteur de ces transactions est difficilement identifiable, ainsi que le bénéficiaire. D’où le risque élevé de blanchiment par le biais du maniement des fonds par plusieurs intermédiaires douteux.

La banque centrale retient également que certains virements en XAF (FCFA) sont effectués par des correspondants bancaires et établissements financiers étrangers, en règlement des opérations d’importation non déclarées. Ici, la Beac condamne le fait qu’un usager fasse des virements en devise étrangère (Dollar ou Euro), dans un compte ouvert par un non-résident, pour une opération d’exportation d’un produit de rente local (banane, cacao, café, bois, thé, …), sans que ladite opération ne soit déclarée, ni enregistrée dans les livres et comptes des douanes Camerounaises. Ce qui pourrait constituer un acte de blanchiment d’argent.

Dernier élément relevé par la banque centrale, les activités menées par les bureaux de change. Les opérations ordonnées par ces institutions sont, d’après la Beac, assimilables à des importations de billets de banque sans autorisation. Dans la pratique, des bureaux de change indépendants ou appartenant à des établissements de crédits, reçoivent à hauteur d’importants montants, des virements en devises étrangères, sans informer la banque centrale. Cette pratique pourrait également cacher un acte de blanchiment d’argent, en violation des dispositions pertinentes de l’article 23 du Règlement Cemac du 11 avril 2016.

Rappelons que malgré le renforcement par le Cameroun des capacités de ses organes d’enquête et judiciaires pour traiter les affaires de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme, le pays figure toujours parmi les pays à risques de blanchiment des capitaux. Du fait que le Cameroun intègre dans son système financier, des produits issus de la corruption, des détournements de fonds, de la fraude douanière ou fiscale, du braconnage, du trafic d’espèces fauniques et d’essences forestières protégées. Notons qu’en juin 2023, le Cameroun a été placé sur la liste grise du Groupe d’action financière (Gafi), organisme inter-gouvernemental qui supervise les tendances mondiales en matière de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme.

À l’intention des banques et établissements de crédits du Cameroun, Yvon Sana Bangui sollicite vigilance et respect de la réglementation. Le Cameroun compte depuis le 15 juillet 2024, au total 19 banques.

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