3 décembre 2024

Ressources oisives: bras de fer persistant entre la Cdec et les banques

(Ripostes,Georges Semey). Alors que ces derniers sollicitent un report sur les opérations de reversement des ressources dormantes dans les comptes de la Caisse des dépôts et consignations, Richard Evina Obam, le Directeur général de cette institution créée par l’État du Cameroun, indique que les concernés ont bénéficié de plus de 15 ans d’un moratoire de fait, et menace de procéder par un recouvrement forcé des fonds objet de ce quiproquo.

Les établissements de crédits du Cameroun retardataires de l’échéance légale rappelée plusieurs fois par la Caisse des dépôts et consignation (Cdec) seront-ils contraints par recouvrement forcé ? Cette hypothèse n’est pas exclue au regard des différentes sorties de mises en garde exprimées par Richard Evina Obam, le Directeur général de la Cdec. Le manager veut en effet passer à la vitesse supérieure après plusieurs rappels à l’ordre effectués à l’endroit des établissements de crédits afin que ces derniers reversent la totalité des fonds oisifs logés dans leurs comptes à cette institution, conformément aux dispositions de la Loi du 14 avril 2008 régissant les dépôts et consignations, ainsi que celles du Décret du Premier ministre du 1er décembre 2023, fixant les modalités de transfert des fonds er avoirs dévolus à la Caisse des dépôts et consignations.

Le communiqué rendu public ce 12 juin 2024 est assez disert sur les intentions de Richard Evina Obam, s’appuyant sur les deux textes supra: « Le Directeur général rappelle aux établissements de crédit retardataires, qui font preuve de résistance et d’incivisme en évoquant des arguments spécieux pour contourner les lois et règlements de la République, qu’ils s’exposent délibérément aux sanctions prévues par la réglementation », prévient-il. Rappelons que l’une des missions générales de la Cdec est celle de collecter, sécuriser et rentabiliser sur le long terme les ressources généralement oisives pour les orienter vers l’accompagnement des politiques publiques. Or depuis sa création en 2008, cette institution est demeurée inactive et inefficace. Ce, jusqu’à la désignation de ses organes sociaux en 2023. Soit 15 ans plutard. Il s’agit donc désormais pour la Cdec, d’appuyer sur l’accélérateur afin d’atteindre ses objectifs.

La tâche ne semble pourtant pas être aisée, malgré les démarches de sensibilisation et de concertation menées à l’intention des établissements de crédits du Cameroun. La toute dernière en date s’est tenue le 13 mai 2024 à Yaoundé. Rencontre au cours de laquelle Richard Evina Obam est resté droit dans ses bottes, face à la farouche résistance des banques et établissements assimilés: « je voudrais rappeler que la Cdec a été créée en 2008 et les organes sociaux mis en place en 2023. Cela a conféré aux banques et autres acteurs, 15 ans d’un moratoire de fait. En plus, il y’a eu un délai supplémentaire, car si l’on s’en tient au décret, c’est 6 mois après la nomination des dirigeants de la Cdec, donc c’est en juillet 2023 que cette exigence de transfert aurait dû entrer en vigueur. Mais c’est par consensus que le Décret a été pris donnant aux acteurs jusqu’à ce 31 mai », a indiqué le Directeur général de la Cdec, face aux responsables des établissements de crédits qui posaient en effet leurs conditions sur le quiproquo avec la Cdec.

Ces représentants, membres de l’Apeccam (Association professionnelle des établissements de crédits du Cameroun), dans leur majorité, ont plaidé en faveur d’une révision des délais d’observation des comptes dormants ou oisifs. Les établissements de crédits du Cameroun sollicitent également un ajournement (moratoire) sur le transfert des fonds à l’origine de ce bras de fer. Par ailleurs, ces dernières souhaitent de la Cdec, une définition claire des modalités de transfert spécifiques à chaque établissement: « le métier de banquier comprenant aujourd’hui la gestion des risques, il faut s’assurer qu’elles soient bien encadrés et que la réforme engagée avec la création de la Cdec, sera bien menée dans les délais », a réagi le 13 mai 2024, Jean Paul Missi, le Directeur général du Crédit foncier du Cameroun (Cfc), vice-président de l’Apeccam. Cette association redoute en effet un effondrement du système bancaire du fait de l’importance des avoirs dormants ou oisifs estimés au Cameroun, à environ 1500 milliards de FCFA (2500 milliards de FCFA en zone Cemac).

Il est important de relever que plusieurs institutions financières se sont d’ores et déjà arrimées à la Loi de 2008, ainsi qu’au Décret de 2023. Il s’agit notamment de la Beac, Allianz Cameroun, la Standard Chartered Bank, le Crédit foncier du Cameroun (Cfc), la Société commerciale de banque au Cameroun (Scb Cameroun) et la Bicec (Banque internationale du Cameroun pour l’épargne et le crédit). « Il est temps de permettre à la Cdec de se déployer comme il se doit », a affirmé le Directeur général de la Cdec, le 13 mai 2024. Et de féliciter récemment les établissements de crédits qui ont franchi le pas: « Le Directeur général tient à féliciter tous les établissements de crédit citoyens qui se sont conformés aux lois et règlements de la République du Cameroun en transférant les fonds et valeurs à la Cdec. Leurs efforts et engagements démontrent clairement une volonté de faciliter le processus d’opérationnalisation de la Cdec», se rejouit-il dans le communiqué du 12 juin 2024. À suivre.

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