21 novembre 2024

Transport pour compte propre: les transporteurs maintiennent le mot d’ordre de grève, malgré la prorogation d’un an accordée sur l’application du Décret du 10 octobre 2022 

Présidée par l’honorable Pierre Sime, la concertation des membres de la plateforme des organisations socioprofessionnelles des transporteurs routiers du Cameroun, s’est déroulée ce 13 octobre 2023, au siège du syndicat national des transporteurs routiers du Cameroun à Douala. Toutefois, El Hadj Oumarou, Coordonnateur du Bureau de gestion du fret terrestre met en garde contre toute récupération politique de ce mouvement par des partis politiques en quête de visibilité.

La rencontre convoquée par l’honorable Pierre Sime, aura été fort tendue. C’est en effet sous une atmosphère surchauffée que le président de la plateforme des organisations socioprofessionnelles des transports routiers du Cameroun, accompagné d’El Hadj Oumarou, coordonnateur du bureau de gestion du fretterrestre (Bgft), a échangé avec tous les acteurs du transport terrestre de marchandises de la ville de Douala. 

Tout d’abord, il était question de recueillir l’avis des transporteurs routiers professionnels à propos du communiqué du Ministre des transports datée du 12 octobre 2023, dans laquelle, suite à l’application des nouvelles dispositions du décret n•2022/8801/PM du 10 octobre 2022, fixant conditions d’accès aux professions de transporteurs routiers et d’auxiliaires des transports routiers, le membre du Gouvernement, Jean Ernest Massena Ngalle Bibehe, accorde un moratoire de 12 mois aux détenteurs (acteurs du secteur des transports routiers en particulier), des licences en cours de validité, à compter du 10 octobre 2023.

Toujours le 12 octobre 2023, le ministre des transports a également adressé une correspondance adressée à l’honorable Pierre Sime, le président de la plateforme des organisations socioprofessionnelles des transporteurs routiers du Cameroun, Jean Ernest Massena Ngalle Bibehe informe de ce que le ministre d’État, Secrétaire général de la présidence de la république, Ferdinand Ngoh Ngoh, a instruit le secrétaire général des services du premier ministre, Séraphin Magloire Fouda, d’examiner les contours du décret cité supra, « en concertation avec le Ministère des transports et les acteurs du secteur », mentionne la correspondance.

Ainsi, en exécution de cette instruction émanant des conclusions d’une concertation déroulée le 4 avril 2023, le ministre des transports affirme que les représentants des transporteurs routiers du Cameroun avaient sollicité et obtenu un moratoire (de quelques jours), afin de déposer un memo récapitulatif de leurs prétentions relativement au transport pour compte propre considéré dans le décret du 10 octobre 2022. « En acceptant votre plaidoyer, la Présidente de séance a recommandé la transmission de ce memo dans les brefs délais pour la poursuite de la concertation, recommandation inexecutée jusqu’à ce jour », relève Jean Ernest Massena Ngalle Bibehe.

Le ministre des transports appelle dès lors les transporteurs routiers professionnels, à produire et transmettre ledit memo, aux Services du premier ministre. Sollicitant de ces derniers, de surseoir à leur mouvement de grève annoncé pour dès mardi 17 octobre 2023. Suite à ces deux sorties du ministre des transports, organisations socioprofessionnelles des transports routiers du Cameroun ont purement et simplement décidé de maintenir le mot d’ordre de cessation d’activités annoncé. « Nous demandons la relecture du Décret querellé tel que instruit par le président de la république. Une relecture concertée entre toutes les parties prenantes dans le respect de la loi », indique l’Honorable Pierre Sime. 

Rappelons que le décret n•2022/8801/PM du 10 octobre 2022, fixant conditions d’accès aux professions de transporteurs routiers et d’auxiliaires des transports routiers, le transport terrestre des marchandises ou du fret est désormais ouvert, outre les transporteurs routiers professionnels, aux tiers n’exerçant pas cette profession (multinationales, grandes entreprises, organisation non-gouvernementales, organisations internationales, et autres bailleurs de fret), qui deviennent de facto, des transporteurs pour compte propre. Ces derniers bénéficient d’une licence spéciale de transport routier de catégorie S6, selon le Décret du 10 octobre 2022.

Les transporteurs routiers professionnels y voient par conséquent « une concurrence déloyale ». Pour ces organisations socioprofessionnelles des transports routiers de marchandises du Cameroun regroupées autour de 6 syndicats (Synatrocam, Opstac, Gttc, Syntraptcam, Reptroc, Sntrc), « le décret du premier ministre, Chef du gouvernement vient sonner le glas d’une profession déjà en agonie en raison des entraves régulières et des difficultés structurelles qui la caractérisent, en plus de l’incidence négative considérable qu’il va engendrer sur les recettes de l’État », relèvent les signataires d’une correspondance adressée le 3 novembre 2022, par ces acteurs au Président de la République. 

Dans le même sens, le décret du 10 octobre 2022 (chapitre ll), institue de nouvelles conditions d’accès à la profession de transporteur routier, subordonné, d’après ce texte, à l’obtention d’une licence délivrée par le Ministère en charge des transports ou par les collectivités territoriales décentralisées. La licence de transport routier (ordinaire ou spéciale), est délivrée pour une durée de 5 ans, renouvelables. 

« Nous devons nous assoeir pour procéderà la relecture de ce texte et définir, un segment pour ce qui est de la distance, un segment pour ce qui est de quantité et un segment pour ce qui est quotité », ajoutr Hilaire Dzipan, transporteur et membre de cette organisation, qui indique par ailleurs qu’en légitimant le transport pour compte propre, le trésor public se prive et perd des recettes subséquentes variant entre 90 milliards de FCFA à  250 milliards de FCFA par an. Il s’agit des tours de passe-passe orchestrés par de haut commis de l’État qui utilisent des prête-noms pour entrer dans cette activité, et éliminer le transporteur routier.

Pour El Hadj Oumarou, le coordonnateur du Bgft, « les transporteurs sont des républicains et entendent se ranger du côté des hautes  instructions du président de la république en faveur d’une relecture du décret querellé au cours d’une concertation sereine et inclusive ». Il lance par ailleurs une mise en garde contre toute récupération politique de ce mouvement en cours par des partis politiques en quête de visibilité, car précise-t-il, « il s’agit d’une affaire qui ne concerne que les professionnels du transport ». La rencontre de ce 13 octobre 2023, a par conséquent débouché sur le maintien du préavis de cessation d’activités dès le 17 octobre 2023.

Félix Beda

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