15 mai 2024

Affaire Dikolo: les Chefs traditionnels des villages Sawa du Wouri contre la mafia autour des DUP

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Ces notabilités coutumières se sont réunies ce 29 mai 2022 à Douala, à l’effet de dresser un diagnostic de la situation sociopolitique et anthropologique dans le Département du Wouri. Un communiqué y relatif a été rendu public ce 19 juin 2022.

Parmi les 5 points saillants ayant marqué le communiqué des Chefs traditionnels des villages Sawa du Wouri sur «l’état du Wouri», celui relatif à la «Question foncière dans le Département du Wouri» occupe incontestablement une place centrale. Au moment où s’achève les travaux de la Commission mixte chargée d’évaluer les casses de Dikolo, les notabilités des villages traditionnels Sawa du Wouri ont clairement pris position au terme de leur Assemblée mensuelle statutaire. «Le Wouri souffre énormément des tripatouillages et magouilles de quelques administrateurs véreux qui, exploitant les faiblesses de quelques Chefs traditionnels (coutumiers) ont disposé des terres du Département. Cela n’est plus acceptable», a fait observer fermement S.M Ruben Ness Essombe Ndambwe, le Président de cette Association.

Qui évoque, avec indignation, un chapelet de griefs sur «le respect de la législation en vigueur»: non-respect de la législation en matière foncière, mise à l’écart du Chef traditionnel coutumier, maillon essentiel du processus d’établissement du titre foncier, au profit du représentant de l’administration, tentative de suppression du rôle du Chef coutumier, neutralisation de l’attestation coutumière ou de l’abandon de droit coutumier etc….». Dans le même ordre d’idées, ce groupement coutumier constate avec grand regret, l’obtention des Déclarations d’utilité publique (DUP), par des opérateurs économiques, aidés par des décideurs laxistes, sur des parcelles de terres appartenant soit, de droit positif à des camerounais, soit de fait à des communautés: «en violation de la réglementation en vigueur, ces DUP devenues caduques du fait de la non réalisation des projets concernés sont récupérés par des individus qui s’approprient des terres arrachées aux concitoyens», insiste l’Association des Chefs traditionnels des villages Sawa du Wouri, par la voix de son président. Ce que ce dernier qualifie de «réseau mafieux»

Des exemples de ces scandales fonciers et accaparements sont en effet légion dans la ville de Douala. Malgré la préoccupation formulée par le Gouverneur de la Région du Littoral, lors de la Conférence semestrielle régionale de coordination administrative, déroulée du 15 au 16 juin 2022, le phénomène prend irrémédiablement de l’ampleur. Le cas de la gare routière de Sodiko est caractéristique des dysfonctionnements décriés. D’après S.M Ruben Ness Essombe Ndambwe, «le site actuellement exploité par la CUD appartient à la Collectivité Sodiko. Mais il est convoité par par des prédateurs, contre l’avis à la fois de l’exploitant provisoire (CUD), et du propriétaire anthropologique (Collectivité de Sodiko)».

Dikolo n’est pas une question Sawa

C’est dans ce sens que l’Association s’est opportunément prononcée sur le cas «Dikolo», hautement d’actualité. Rappelons que le 14 mai 2022, les biens meubles et immeubles de plusieurs familles ont été détruites, dans le cadre du très contesté, projet de construction de l’hôtel Marriot de Douala. Provoquant une onde de choc et des manifestations du peuple Sawa du Wouri. À ce sujet, les notabilités des villages traditionnels Sawa du Wouri s’alignent sur la position du Ngondo et des familles victimes: «à savoir que la partie du site qui n’est pas concernée par la DUP doit être restituée aux familles propriétaires, qui doivent par ailleurs recevoir totale indemnisation de leurs immeubles détruits. Les initiatives administratives actuelles qui se penchent sur l’indemnisation des victimes pour cause d’utilité publique, ne vont pas dans le bon sens et préfigurent un passage en force». Une position sans ambiguïté sur un dossier qui menace la sécurité publique. «L’État doit protéger ses enfants et non les plonger dans une insécurité foncière absolue, qui fera le lit d’une déflagration sociale que personne ne pourra contenir. Dikolo n’est pas une question Sawa. Ce n’est pas une tribu contre une autre tribu…», martèlent les Chefs traditionnels des villages Sawa du Wouri.

Relevons que la concertation a également connu l’examen des points relatifs à «la cherté grandissante de la vie et la dégradation de la qualité des produits de consommation», «le développement de la ville de Douala», «l’adressage des rues de Douala et la construction des monuments en la mémoire de tous les héros nationaux dont Rudolf Duala Manga Bell», «la dévolution successorale», «la reclassification des chefferies», et «le paiement pour l’organisation des manifestations culturelles par les communautés».

Georges Semey

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