Malgré les projets réalisés par l’Etat du Cameroun et la communauté urbaine de Douala, quasiment tous les quartiers de la capitale économique sont frappés par ce phénomène hydrique à l’origine des dégâts démesurés. Les pouvoirs publics et les populations se rejettent les responsabilités.
Comme lors des précédentes années, les pluies diluviennes qui arrosent la capitale économique Douala, ont de nouveau provoqué d’importants dégâts directs ou indirects : inondations géantes, destruction de biens, chaussée impraticable, effondrement de maisons, éboulements etc…..Des scènes surréalistes malheureusement caricaturales de l’ampleur du phénomène. Pourtant, la Communauté urbaine de Douala a parachevé en 2019, le Projet de drainage pluvial de Douala (le Pdp), un programme d’aménagement de 49 km de drains primaires et secondaires bétonnés dans 5 arrondissements de Douala, 36 quartiers et sur un espace de 1592 hectares. Pour un montant de 109 milliards de fcfa, sous financement de l’Agence française de développement (Afd). La matérialisation de cet important projet portait à près de 60 km, le tracé de drains primaires et secondaires de Douala, qui n’était doté que d’environ 10 km de drains.
Cité pluvieuse, Douala reçoit en moyenne 4000 mm d’eau annuellement. Un débit insupportable par le réseau de drainage actuel, déficitaire de près de 200 km de drains. Pour juguler le phénomène des inondations, apprend-on des spécialistes, la métropole devrait en effet disposer de plus de 250 kilomètres de drains primaires et secondaires. Les dernières pluies ont, une fois de plus laissé, apparaître des failles dans le système de drainage de Douala dans les quartiers Akwa (Douala 1er), New-Bell (Douala 2), Logbaba (Douala 3), Nkomba-Bonaberi (Douala 4) ou Makepe-Misoke (Douala 5). Des quartiers hautement inondables pourtant traversé par le Pdp. Pour le Dr. Roger Mbassa Ndine, le maire de Douala, la récurrence des inondations s’explique partiellement par les milliers de bouteilles plastiques et autres déchets jetés dans les drains et les caniveaux par les populations. Il déplore par ailleurs la violation systématique des dispositions énoncées dans le Plan directeur d’urbanisme et celui d’occupation des sols (Pdu/Pos) de Douala par certains habitants qui construisent sur les zones drainables ou non-constructibles.
Les populations pointent quant à elles, un doigt accusateur sur les responsables de la ville. Elles dénoncent en effet le manque ou l’insuffisance d’infrastructures de drainage dans les quartiers difficiles. Mais également, le déficit de viabilisation, ou d’entretien des canalisations existantes. Sur le Pdp, les habitants des quartiers Bonaberi, Village, ou Cité des palmiers etc.. déplorent par ailleurs, la mauvaise qualité des drains, étroits par ailleurs, ou peu profonds par endroits. «Des drains mal calibrés», insistent-ils. A la Mairie de Douala, on se défend d’avoir initié d’importants projets d’assainissement des quartiers difficiles : le projet «Douala Ville durable» (aménagement et valorisation du site de Makepe-Missoké pour un montant de 4 milliards de fcfa financés par la Cud et l’Afd), ou le Projet d’amélioration du cadre de vie des quartiers sous-équipés ou mal desservis de la ville de Douala. La ville de Douala bénéfice également du Pdvir (Projet de développement des villes inclusives et résilientes) financé par la banque mondiale, concernant 12 quartiers. En attendant la concrétisation desdits projets, la capitale économique ploie sous des inondations devenues chroniques.
Rainbow
L’expert se prononce de façon détaillée sur les causes directes et indirectes des inondations dans la capitale économique.
Pourquoi les inondations persistent-elles à Douala ?
Les inondations persistent parce que les mêmes causes produisent les mêmes effets dans les mêmes conditions. Les inondations sont les conséquences d’une conjonction des facteurs humains naturels. Les territoires mouillés sont des vastes plaines basses à faible pente. Ajoutée à cela, la saturation des sols en eau. Alors quand il pleut, l’écoulement des eaux de ruissellement est très faible, et s’il arrive que la marée est haute, la période de stagnation des eaux sera plus longue. Les comportements inciviques des habitants de Douala augmentent l’intensité des inondations: il s’agit de l’occupation anarchique des sols (71% taux d’occupation), le rejet des déchets solides dans les caniveaux etc… Ces facteurs freinent le système de drainage des eaux. Évidemment on ne manquera pas de relever la responsabilité des autorités locales qui ne parviennent toujours pas à doter à la ville de Douala les infrastructures d’assainissement liquide et solide fiables en fonction de la croissance démographique
Pensez-vous que le Pdp de la Cud a été mal réalisé ?
Non. Le Pdp a plutôt réduit les vulnérabilités des inondations. Sauf que, la population en général et en particulier les riverains des drains pluviaux ont tendance à en faire des dépotoirs aquatiques. Actuellement on a moins de 40 km de drains pluviaux à Douala, sur un besoin global de 250 km.
Les populations ont-elles une part de responsabilité ?
Absolument. Je vais plus loin. Pendant qu’il pleut, c’est le moment que certains habitants vident les poubelles dans les eaux de ruissellement, ouvrent les vannes des Wc. Malheureusement ces eaux chargées de matières en suspension iront contaminées les sources d’eau superficielles (puits ou forages), où la plupart des personnes s’abreuvent, car moins de 30% des ménages ont accès au réseau public de distribution d’eau potable.
Propos recueillis par Rainbow