Des pratiques obscènes dans les lieux clos se répandent irréversiblementdans les grandes villes du Cameroun, ou dans les petites localités du triangle national. Ces phénomènes inquiétants portent gravement atteinte aux bonnes moeurs, à l’ordre public, ainsi qu’aux lis de la République. Maître Blaise Djounang apporte des éclairages pertinents sur ce qui est permis ou autoriser en la matière.
1- Maitre pouvez-vous nous expliquer ce que l’on appelle outrage publique à la pudeur ?
L’outrage public à la pudeur est une infraction réprimée dans le code pénal camerounais. Ledit code ne le définit pas clairement mais d’une manière générale, cette infraction s’entend comme tout acte impudique accompli en public, offensant ou pouvant offenser le sentiment de pudeur des particuliers qui en sont involontairement témoins. C’est une offense que l’auteur fait aux valeurs morales consacrées dans la société.
2- Maître est-ce à dire que le phénomène de striptease pratiqué dans certains débits de boissons peut être ou doit être considéré comme un outrage public à la pudeur ?
Evidemment, par définition le striptease est un spectacle, une danse au cours de laquelle une femme (parfois un homme) se déshabille de manière suggestive, doucement et sensuellement devant un public. C’est parfois une exhibition sexuelle imposée à la vue d’autrui dans un lieu accessible au regard du public. Le fait d’exposer ainsi sa nudité à la vue du public heurte la moralité des citoyens et s’inscrit par ce fait en marge des valeurs sociales protégée. C’est vrai qu’il existe dans la loi un certain flou en ce qui concerne la légalité ou non du striptease, mention n’étant faite nulle part dans la législation. Cependant, se dévêtir en public même dans un club dit privé peut être considéré étant immoral et indécent et constituer un outrage. Il me semble d’ailleurs que les licences d’exploitation des débits de boisson ne sont pas délivrées aux fins de striptease. Ceux-ci se livrent donc à de telles pratiques agissent en marge de la légalité et de façon clandestine. Ils peuvent être poursuivis pour cette infraction.
3- Ces endroits sont réservés aux personnes adultes et consentantes d’aller voir du striptease. Peut-on toujours considérer cela comme une dépravation ?
Le consentement des personnes ou le fait qu’elles soient majeures ne caractérisent pas l’infraction d’outrage public à la pudeur dans le code pénal. Ce qu’il faut relever dans cette infraction, pour qu’elle soit établie c’est la publicité de l’acte indécent. En un mot, il faut mais il suffit, qu’il y ait eu possibilité que le public fut offensé par le spectacle de l’acte immoral ou obscène, sans qu’il soit nécessaire de rechercher si en fait, il y a eu ou non des témoins de cet acte ; et si cette publicité a été ou non voulue par le délinquant. Pour que l’outrage public à la pudeur ou pour mieux dire l’outrage à la pudeur publique existe, il faut s’attacher en effet à l’éventualité d’un scandale, d’une offense à la pudeur de tous. Il suffit que le coupable se soit exposé dans un lieu public ou privé aux regards d’autrui par sa volonté ou sa négligence en accomplissant ne action immorale ou obscène. Les débits de boissons sont par essence des lieux publics, c’est donc dire qu’une personne qui se dénude dans ces lieux en s’offrant en spectacle heurte la moralité du public en commettant un outrage à la pudeur. Par cela même qu’il est accompli dans un tel lieu, l’outrage à la pudeur tombe sous le coup de la loi alors même qu’il n’aurait été vu par personne. Il importe donc de déterminer ce qu’on doit entendre par lieux publics. Les lieux publics ceux qui sont ouverts ou accessibles à tout le monde soit gratuitement, soit moyennent rétribution ou certaines conditions d’admissibilité. Les débits de boissons se retrouvent bel et bien dans cette définition.
4- Quelle différence y a-t-il entre l’outrage public à la pudeur et outrage aux mœurs ?
Ces deux délits sont prévus et réprimés de la même peine par le code pénal camerounais en ses articles 263 et 264. Ces infractions ont ceci de commun que le fait incriminé ne blesse pas la pudeur d’une personne déterminée, comme le viol, mais constitue une atteinte à la décence publique, une atteinte aux mœurs de toute une catégorie de personnes, d’où la conséquence que la loi ne le réprime qu’autant qu’il revêt une certaine publicité. L’outrage à la pudeur suppose qu’un individu accomplit des actes, exhibitions ou gestes obscènes qui peuvent être aperçus de plusieurs personnes et blessent ainsi ouvertement leur pudeur alors que l’outrage aux bonne mœurs dans ses éléments caractéristiques, renvoie aux chants, cris ou discours contraires aux bonnes mœurs, que l‘acteur met à l’écoute ou sous les yeux du public : ce délit frappe aussi celui qui attire ou incite le public sur une occasion de débauche.
5- Pouvez-vous nous expliquer les articles 263 et 265 du code pénal camerounais ?
L’article 263 réprime l’outrage public à la pudeur en punissant son auteur d’un emprisonnement de 15 jours à 02 ans et d’une amende de CFA 10000 à CFA 100 000 ou de l’une de ces deux peines seulement. J’ai humblement expliqué supra, ce que l’on peut entendre par outrage public à la pudeur. L’article 265 est relatif aux publications obscènes. Le législateur a été plus sévère en ce qui concerne la répression de ce délit en punissant le délinquant d’un emprisonnement de un mois à deux ans et d’une amende de CFA 10000 à CFA 500 000 ;
Dans ses éléments caractéristiques, l’alinéa 1(a) et (b) nous indiquent que l’auteur de cette infraction est celui qui :
-Fabrique, détient, importe, transporte ou exporte en vue d’en faire le commerce ou ;
– Expose ou distribue même à titre gratuit et même non publiquement tout écrit, dessin ou objet tendant à corrompre les mœurs.On constate aisément qu’il s’agit ici des actes pendant o corrompre les mœurs qu’ils soient publics ou pas. L’alinéa 2 de cet article nous indique également que la juridiction peut outre les peines prévues à l’aliéna 1 ordonner la fermeture pour une durée d’un an au plus l’établissement ou le condamné fabrique ou détient lesdits écrits, dessins ou objets.
6- Peut-on conclure que c’est à la base du code pénal que l’administration s’appui pour sceller les débits de boissons qui pratiquent cette activité ?
Les personnes qui se livrent ou qui pratiquent le striptease dans les débits de boissons peuvent être poursuivis tout comme le promoteur de la structure pour outrage public à la pudeur. L’établissement qui abrite et cautionne cette activité peut par voie de conséquence être fermé parce qu’on y exerce une activité proscrite par la loi. C’est un établissement qui fonctionne dans la clandestinité en s’inscrivant en marge de l’objet contenu dans la licence d’exploitation.
7- Votre mot de fin sur le droit et les exploitants de débits de boissons.
Nul n’est censé ignorer la loi, l’activité des débits de boisson est fortement règlementée et j’exhorte simplement tout exploitant de se conformer aux règles qui régissent ce secteur d’activité afin d’être à l’abri de nombreux désagréments.
NDLR: le surtitre, le titre et le chapeau sont de la rédaction
Ripostes avec La Voix du Barman